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Stuff, Montreux 1978
Stuff, c’est l’histoire d’un groupe instrumental monté sous la houlette du bassiste Gordon Edwards (à ne pas confondre avec Scott Edwards, autre éminent bassiste). Il réunit les flamboyants session men Cornell Dupree (Donny Hathaway, Aretha Franklin, Curtis King Jr…), le guitariste de jazz Eric Gale, l’irremplaçable Steve Gadd à la batterie, le pianiste Richard Tee, précédé un temps par Chris Parker. Leur prestation témoigne de un mélange de sophistication, d’énergie et d’urgence. Urgence, car le groupe faillit manquer ce concert par ce jour de canicule du 2 juillet 1976, qui vit leur vol pour la Suisse retardé au point de manquer le soundcheck : le groupe se brancha sans même savoir…
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O. V. Wright : l’oublié de Memphis
Overton Vertis Wright, connu par ses initiales “OV” Wright, est un des damnés de la soul du Sud des États-Unis. Sa carrière est sera aussi courte que mouvementée, mais il fixera sur l’acétate de vinyle à jamais sa voix dont l’expressivité brute n’a d’égal que la douleur qu’elle évoque. Élevé par sa mère dans les environs de Memphis, il reçoit une éducation religieuse et dès l’âge de 6 ans il fait partie de la chorale gospel de sa paroisse. L’enfant prodige vole la vedette au prêtre : les fidèles se mettent davantage sur leur trente et un par hommage au fils prodigue. Des immondices à la grace A 17 ans, il survit…
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George Duke : le bâton du duc
Il est l’homme au sourire éternel. Le keytariste émérite. Le pianiste de jazz coupable de délit de funk music. La scène jazz lui reproche de s’abaisser à une musique trop lisse, sinon insipide et commerciale. Lui s’en fout, il est heureux, il brille. Le Japon l’acclame. En 1983, star incontestée au Pays du soleil levant, il emmène un casting de pointures (Paul Jackson à la guitare, Louis Johnson à la basse, Steve Ferrone à la batterie) pour des concerts magistraux. Il est bien plus que le musicien. Il est LE maître de cérémonie. Le Duc. Celui d’après Ellington : le Duc électronique au sceptre, son Dukey Stick (une des titres les…
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Qui est donc “Pa Sucordoze” ?
À propos d’un air de Jules Arlanda Voilà un nom qui ne dira pas grand chose au profane. À La Réunion, ceux qui connaissent et chantonnent le plus grand succès de Jules Arlanda (1923 – 2010) interprété par Pierrette Payet, Quand li mett’ son moulure (en français “quand il met ses beaux souliers”, autrefois connue sous le titre Ti Roger), connaissent l’expression qui ponctuent le refrain mélancolique (c’est bien un regard sur le passé des bals la poussière qui est porté) : “Comme dans l’temps Pa Sucordoze”. Sorti de l’imaginaire de Georges Fourcade C’est dans le théâtre de saynètes du chansonnier Georges Fourcade (1884 – 1962) que je suis allé chercher l’origine de cette…
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Patrice Rushen : don’t forget her not(e)s
C’est à seulement 19 ans que Patrice Louise Rushen publie son premier album de jazz groovy, intitulé Prelusion, en 1974 chez Prestige Records. Des débuts jazz précoces Un album entièrement instrumental, qui reprend la figure de l’odyssée groovy, comme ont pu le faire quelques années auparavant l’organiste Jimmy Smith (pensons au mémorable Roots Down) ou Grant Green sur son groovy Live at the Lighthouse, voire même le Kool Jazz de Kool and The Gang. Pour ce qui est des musiciens présents sur l’album, tenez-vous bien, le casting est de qualité : Patrice Rushen – voix, piano, piano électrique Rhodes, synthétiseur ARP, clavinet Tony Dumas – basse électrique, contrebasse Leon “Ndugu” Chancler –…
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Quand Carrousel tournait
L’histoire a souvent été répétée, quand on aborde le tournant des années 1980 pris par le maloya électrique. Il est vrai que Carrousel était une formation exclusive et inédite à La Réunion, par son désir d’innover et d’explorer. On a souvent, semble-t-il, cantonné le groupe à une version un peu essoufflée des Caméléons. Un groupe à part entière Après le départ d’Alain Péters aux balbutiements, la formation, sous la houlette de Loy Ehrlich, trouve ses membres permanents et son rythme de croisière. Dans un sens, on peut s’affliger que le titre de ce reportage diffusé le 30 novembre 1982 dans l’émission Bleu Outre-Mer (RFO) et archivé par l’INA en 2017,…
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Aaron Dodd (1948 – 2010)
L’industrie de la musique est sans pitié. Même pour ce vétéran du tuba décédé maintenant il y a presque dix années. Aaron Dodd (1948 – 2010) a gravé sur l’acétate de vinyle, entre autres prouesses mémorables, la célèbre ligne de tuba qui ornemente la reprise du I Believe to My Soul de Ray Charles par Donny Hathaway. Sur ce classique de rhythm & blues, Donny Hathaway transforme le thème du mode mineur en majeur, transfigurant la balade triste en une plaidoirie fanfaronnante. Sur le pont, Aaron Dodd double au tuba la ligne de basse Fender du non moins légendaire Louis Satterfield. Et pourtant. L’instrument est ingrat et peu mis en valeur en…
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Je l’appelais Morgan
Tel est le titre du film documentaire de Kasper Collin consacré à l’incroyable musicien qu’était Lee Morgan : I Called Him Morgan. Morgan, génie des pistons, alchimiste du hard bop jusqu’en 1972, où il trouve la mort sous les balles de son épouse Helen, folle de jalousie. Lee Morgan avait alors l’âge christique : 33 ans. La trame narrative de ce film documentaire est guidée par les entrevues enregistrées par Larry Reni Thomas, enregistrées en 1995 et 1996. Thomas, alors enseignant en arts, s’est trouvé ébahi d’avoir parmi ses élèves une femme âgée du nom de Morgan et de découvrir qu’elle était la femme du musicien. Veuve et assassin à la fois, puisqu’elle…
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Carole King : Tapestry, une tapisserie pop
Jusqu’à cette période où elle commença réellement sa carrière solo d’interprète, Carole King réservait ses compositions à quatre mains (avec son ex Gerry Goffin) pour d’autres, à l’instar des tandems Ashford & Simpson (Motown) ou Leiber & Stoller (Sun, Atlantic, A&M…). Tapestry, donc, figure comme le chef d’œuvre de Carole King : un jeu de mots entre tapestry (tapisserie) qui évoque un matériau sous forme de fresque, que l’on déroule, et le terme tape, qui renvoie à la musique enregistrée sur bandes magnétiques. C’est en 1971 que paraît l’album sur le label Ode Records, sous la houlette de Lou Adler. Pour réaliser cet opus, Carole King s’entoure de ses musiciens fidèles, Danny…
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Ernie Barnes
Le peintre Ernie Barnes (1938 – 2009) a illustré plusieurs albums emblématiques des années 1970. Ainsi, son Sugar Shack a marqué les esprits, en devenant l’illustration de pochette de l’album I Want You de Marvin Gaye, en 1976. Ce thème nous permet d’aborder une relation assez rare et singulière entre le monde des arts et le sport. Un sportif visuel Ernie Barnes était autant athlète qu’artiste visuel. Talent pluriel, il a joué de surcroît à haut niveau en intégrant de prestigieuses équipes de football américain (Baltimore, New York, San Diego, Denver… avant de mettre le cap sur le Canada pour achever sa carrière sportive). Déségrégation et engagement artistique Les prémices de…